Pour une pro alpine (il n’est pas sans rappeler que mon père vit dans la Vercors), randonner dans les montagnes des Pyrénées était une première ! A 28 ans, il était temps de les découvrir un peu non ?!
Alors vous me suivez pour 3 jours assez grandioses, pour ne pas dire un peu extrêmes dans les hautes Pyrénées, côtés français et espagnol (histoire de parler un peu espagnol, ou pas !) ?
Avant toute chose, je tiens à préciser que le programme des 3 jours avait été conseillé par mon pote Dimitri (cf : GR20 et GRR2 de la Réunion), un grand fou (oui pire que moi) qui m’avait décrit ce parcours « comme assez sportif »… Sportif, ce le fût, mais je rajouterais aussi : difficile et dangereux…surtout lorsque la neige n’a pas du tout fondu, et ce, même à la fin du mois de juillet.
Histoire de ne pas être seule, j’ai embarqué la petite Marine dans cette escapade un peu folle, qui n’était pas sans lui déplaire, enfin…rien n’était moins sûr (surtout que c’était sa première rando, après je savais qu’elle allait gérer car c’est une très grande traileuse)… Verdict à la fin de ce long week-end.
Petit brief la veille du départ pour vérifier ce qu’elle a bien pu mettre dans son sac. J’ai un peu fait ma Mike Horn dans son émission lorsqu’il part en expédition avec des stars. « Alors ça non, ça non plus, mais pourquoi 4 tee-shirts alors que l’on part 3 jours ?! ; pareil pourquoi 2 shorts, un seul suffit ; euh ton gant de toilette, tu m’expliques ? ; ok pour le shampoing si tu veux mais tu verras que tu ne te laveras quasiment pas… ; »…
Day 1 : Arrens – Col Noir – Larribet : 1200m D+
Un réveil vraiment aux aurores, tout ce que j’aime vu que je suis du matin haha !
Un peu de route depuis Argeles Gazoles, lieu de notre dodo, chez Marine, pour nous diriger vers le départ du trek à Arrens. Nous avons bien fait de partir tôt car l’étape du jour du tour de France passait dans les Pyrénées, du coup toutes les routes allaient être coupées à la circulation, ce qui n’était pas pour nous déplaire (personne sur la rando ce jour là).
Départ vers 8h sous le soleil et la belle lumière du matin.
Une petite montée pour se mettre en jambe qui débouchait sur notre premier lac de la journée avec une cascade qui se jette dedans. Tout autour les montagnes, ça y est nous commencions déjà à nous sentir dépaysées…
Bifurcation pour nous diriger vers le Larribet. Que de la montée le long d’une rivière avec autour une végétation verdoyante, magnifique. Nous étions complètement seules, vraiment top !
Nous sommes arrivées très rapidement au refuge du Larribet (bien plus rapide que les panneaux d’indication, mais bon sans surprise, je commence à avoir l’habitude avec les topos du GR20 en Corse et GRR2 à la Réunion).
Petite pause afin d’une part de grignoter un bout histoire de recharger un peu les batteries pour la grosse montée qui s’annonçait et d’autre part demander au refuge si le passage par la Brêche Latour pour atteindre le Balaitous était possible, car cet hiver il y a eu énormément de neige donc il restait beaucoup beaucoup de névés (nous allions nous en rendre compte très rapidement). La gardienne du refuge nous a clairement indiqué que c’était impossible de passer par la Brêche Latour, complètement enneigée… par contre une ouverture semblait possible par le Col Noir. Nous lui avions bien évidemment précisé que nous n’étions pas du tout équipées pour de l’alpinisme (pas de piolet, crampons, cordes).
Bien motivées nous avons donc repris notre chemin par de la montée. A partir de ce moment-là, c’était complètement free style, avec au début un semblant de chemin puis plus rien, donc aucun balisage (vite fait par des cairns et encore !), avec quasiment que de la caillasse (donc forcément les cairns dans de la caillasse bah c’était de la caillasse en plus !)…

Passage sublime à côté des Lacs Batcrabere, d’une pureté. Comme une envie de piquer une petite tête ? Vue la neige aux alentours, nous pouvions supposer que l’eau était gelée.
Ensuite, la galère, car nous étions dans la caillasse, à essayer d’éviter au mieux la neige mais nous avions un peu dévié de la trajectoire, car nous voulions vraiment prendre le col avec le moins de névés…
Donc à plusieurs reprises, nous sommes un peu revenues sur nos pas, à escaler les grosses roches !
Nous pouvions voir notre point de mire au loin, mais alors vraiment au loin ! Même si nous avions quand même bien avancé depuis le refuge ! D’ailleurs la végétation avait complètement changé, avant beaucoup de verdure, arbustes, etc, là c’était comme je l’ai dit caillasse, lacs, neige et glace !
Une pause déjeuner se faisait sentir, surtout qu’il commençait à faire chaud. J’ai englouti mes barres en un rien de temps (bon ok, niveau déjeuner il y a mieux, mais nous avons fait au minimum pour la nourriture pour ne pas avoir à trop porter !), et des pains au lait au chocolat ! Tout de suite, en pleine forme pour repartir de plus belle pour la dernière partie de la montée…et quelle montée !
Nous avions à moitié aperçu au loin un semblant de chemin dans la caillasse, qu’on a réussi à rattraper en passant par une grosse névé.
Une montée bien raide en mode free style (encore) car au bout de quelques mètres, il n’y avait plus de tracé.
Nous sommes arrivées sur la dernière partie d’escalade beaucoup plus rapidement que ce que nous pensions. Mais c’est ici que ça se corse…
Il a fallu être vraiment bien concentré car chaque geste comptait, en devant trouver les prises adéquates.
En voulant contourner une névé à quelques mètres du sommet, Marine m’a fait tellement peur, j’ai bien cru qu’elle allait nous entrainer dans sa chute toutes les deux. En voulant s’agripper à une roche, cette dernière s’est fissurée sous son poids (et ce n’est pas comme si nous étions obèses !). Marine a glissé de quelques mètres sur moi… D’énormes cailloux ont dégringolé dans la falaise, tandis que nous reprenions à peine nos esprits en nous disant qu’on aurait clairement pu être les cailloux…
Les jambes qui flagellent et la peur au ventre, il fallait bien y accéder au sommet…
Lorsque nous y sommes arrivées, c’était la délivrance, un énorme soulagement. Enfin… nous ne savions pas ce qui nous attendait derrière… Car de l’autre versant c’était pire haha !!
Nous venions donc de passer en Espagne. Notre but était de rejoindre par ce versant le refuge Respomuso.
Un vent de malade ! Clairement heureusement que nous avions nos gros sacs sinon nous aurions volé (la team des poids plumes dont leurs sacs sont presque plus gros qu’elles !).
Des névés partout, une descente très abrupte… J’ai proposé à Marine que nous commencions la descente pour pouvoir nous abriter et sortir la carte. Comme sur le versant français, pas de tracé, donc encore une fois, il fallait aviser. En gros, le refuge se trouvait derrière une chaine de montagne.
Du coup deux possibilités :
- Descendre tout le versant et longer les lacs en bas, sachant que les lacs étaient entourés de neige et de glace, donc impraticable sans matériel d’alpinisme ;
- Passer une énorme névé dans une pente extrêmement raide et prendre le risque de glisser sur plus de 1000m de dénivelé…
Deux possibilités alléchantes non ??! Je vous laisse deviner laquelle nous avons choisi, un peu paniquées…
Bah aucune des deux !! Voilà nous avons pris une décision censée, c’est-à-dire rebrousser chemin et ne pas tenter le diable, car clairement sans crampons et piolets cela ne passait pas. Ce qui m’inquiétait le plus était aussi de devoir redescendre l’énorme montée que nous venions de franchir alors que Marine avait failli dévaler sur toute la pente…
Mais bon nous n’avions pas d’autre choix si nous souhaitions rester en vie. Vous allez penser que j’en rajoute un peu (non je ne suis pas Marseillaise, je le rappelle !), mais je vous décris réellement ce que nous avons vécu et ressenti pendant cette expédition. Surtout que depuis le refuge du Larribet nous n’avions vraiment vu personne !
Prendre la bonne ou la mauvaise décision, persister ou s’arrêter, tout est question de choix.
Parfois renoncer ce n’est pas abandonner, c’est simplement raisonner, car face à la montagne nous sommes très loin d’être invincibles…
Nous avons donc pris notre temps pour descendre, sans prendre de risque, si nous avions pu monter c’est que nous pouvions redescendre non ?!
Arrivées en bas de la première partie, nous savions que le plus dur était passé, alors petite pause bien méritée en mangeant des barres.
Le reste a été plus calme, toujours personne en vue à part un énorme troupeau de moutons, qui nous bouchait le chemin (enfin pseudo chemin). Il a donc fallu les laisser passer (depuis ma péripétie avec les vaches au Népal, je ne préfère pas m’aventurer et rester à distance de ces bêtes).
Retour au refuge du Larribet un peu énervées contre la gérante qui aurait vraiment pu plus nous mettre en garde. Nous avons également discuté avec 3 mecs qui eux aussi avaient dû rebrousser chemin face à l’impossibilité totale de passer par le versant espagnol (ils avaient tenté le passage par un autre col).
Histoire de bien finir la journée en beauté, j’ai trouvé le petit ruisseau en bas du refuge très sympathique pour me « laver ». Enfin, je l’ai trouvé nettement moins sympathique lorsque j’ai mis les pieds dedans ! Quelle horreur !! Vu mes cris, Marinette n’a même pas voulu s’aventurer ! Pour tous ceux qui pensent que la mer est froide en Bretagne, allez dans les Pyrénées vous ne penserez plus la même chose…
Finalement, les douches froides c’est mieux !! (car oui il y avait des douches et même des douches chaudes, mais il fallait payer, no way en rando c’est à la dure, le confort on l’a chez nous !).
Gros coup de cœur pour ce petit refuge très tranquille, avec une vue imprenable.

Comme d’habitude j’adore les ambiances de refuge, à la bonne franquette, convivialité, et bonne bouffe (car oui après toutes ces péripéties, nous avions faim). Petits jeux en retombant en enfance (le master mind, histoire de faire un truc un peu intellectuel de notre journée), enfin on s’est fait piquer notre partie par une petite (pfff, on ne pouvait bien évidemment pas l’engueuler !)
A 20h, que faire ? Grosse fiesta ?? Haha !! juste un bon gros dodo ! Et top nous étions seules dans notre dortoir, le grand luxe !
Day 2 : Larribet – Col Peyre Saint Martin – Respomuso
Un réveil tôt sous les nuages et brouillard, puis petit déj du refuge.
Nous voilà reparties pour notre deuxième jour de trek, vue sur les montagnes puisque le brouillard s’était dégagé.
Etant donné que nous n’avions pas pu rallier le refuge de Respomuso la veille nous avions une revanche à prendre ! Allions-nous y arriver au final ??! Tous les chemins mènent à Respomuso, oui oui ! Et nous aimons obtenir ce que nous voulons.
Donc nous avons redescendu par le même chemin que la veille qui nous avait mené au refuge. Plus nous descendions, plus nous étions dans le brouillard.
Comme d’habitude (je dis cela comme si nous randonnions depuis des jours, c’était l’impression qu’on avait tellement nous étions bien dans nos montagnes), personne à l’horizon.
Pour passer par un autre versant, nous avons bifurqué en prenant la direction du col Peyre saint Martin. Une montée très progressive assez longue mais qui se fait très bien vu que c’est limite du faux plat et qui longe la rivière et des lacs. Pas vu les lacs ni la rivière, la seule chose que nous voyions c’était nos pieds et nos bâtons…à peine à 2 mètres en fait, à cause du brouillard ! Magnifique cette vue, la plus belle du week-end !
Au sommet du col, surprise, le brouillard s’est complétement dissipé ! C’était notre cadeau de bienvenu en Espagne, très sympathiques les espagnols.
Histoire de galérer un peu, nous avons escalader des roches afin d’éviter une énorme névé alors que passer de l’autre côté était nettement plus facile. En même temps si c’est trop facile, c’est moins drôle non ?!

S’offrait à nous une vue magnifique sur un premier lac, les montagnes espagnoles et la muraille de Chine (« what ? elle ne devait vraiment pas être forte en géographie la petite. » Bon ok ce n’était pas la muraille mais de loin, elle ressemblait, faudra donc que j’aille en Chine pour vous dire si nous pouvions réellement les confondre haha). Le spot parfait pour déjeuner même si un peu venteux (triple sandwich beurre de cacahuète, oui oui je ne me refais pas, ils m’accompagnent dans tous mes treks, et le matin je ne les avais pas mangés car on avait décidé de prendre le petit dej du refuge !).
Mini descente, pour atteindre une prairie verdoyante avec des vaches, un lac et la mini muraille ! Juste magnifique.
Progressivement, nous sommes arrivées aux abords du fameux lac Respomuso (enfin !!!!). Franchement c’était incroyable, un lac sublime entouré des montagnes, qui donnait tellement envie d’y plonger (j’y reviendrai…).
Soudain, un monde monstrueux (bon j’exagère à peine !), personne depuis le début de notre trek, là nous croisions un nombre incalculable d’espagnols, mais d’où sortaient-ils ??
Franchement quelle joie d’arriver enfin au refuge Respomosu, nous avions juste un jour de retard ! On dira qu’on s’était mis à l’heure espagnole !!

Le refuge est idéalement situé, à flan du lac. Dommage, un peu trop touristique à mon goût, surtout que ça nous changeait de notre petit refuge tout calme de la veille.
Comme il était seulement 15h, nous avons posé les sacs et sommes reparties de l’autre côté, vers la Sarra.
Des paysages complétement différents de ce que nous avions pu voir précédemment, avec plus de végétations (normal nous descendions), rivière, et neige (ça ne changeait pas vraiment !).
Puis nous sommes revenues tranquillement au refuge en fin de journée.
Il faisait chaud, quoi de mieux que d’aller piquer une petite tête dans le magnifique lac ? Quand nous avons gouté l’eau, nous nous sommes vite ravivées sur le « piquer une tête ». On va s’arrêter au ventre, c’est déjà bien non ?! et Marine aux cuisses.
La cryothérapie naturelle parfaite et surtout parfait pour se laver (enfin laver, c’est vite dit hein, plutôt se rincer tant bien que mal).

Posées tranquillement, nous étions tellement bien, complètement déconnectées du monde extérieur et notamment de l’effervescence espagnole du refuge.
Petit moment de love : nous avons été témoins d’un moment de drague par une petite marmotte envers une autre, tellement mignon…

C’est à peine si nous voulions remonter au refuge… Mais bon, c’est plutôt notre estomac qui nous a guidé pour le coup.
Moins conviviale que notre tablée de la veille mais des espagnols ont tenté le dialogue (assez chaotique, oh que les années d’espagnol au lycée sont loin…), tout en mangeant de la soupe et un bon gros plat à base de viande. De quoi reprendre des forces pour le lendemain.
Bon le sommeil a été entrecoupé de ronflements (j’ai dû mettre deux boules quies par oreille tellement c’était puissant) …
Day 3 : Respomuso – Arrens
Hum, un réveil tout en douceur… ou pas !! On dort mieux en tente, ça je vous le dis ! Après faut la porter la tente, donc c’est un choix.
Petit déj, je vous laisse deviner !! (bravo mes triples sandwichs au beurre de cacahuète, bien écrasés sortis du fond du sac).
Départ sous un vent de malade mais une luminosité magnifique sur le lac, à la fois nuageux avec le soleil qui pointait son nez…
Bizarrement, nous nous sommes retrouvées seules (où étaient passés les espagnols ?? no lo sé… A croire qu’ils viennent au refuge juste pour boire des pintes !).
Retour par le passage que nous avions emprunter la veille, avec notre petite muraille de Chine. Aujourd’hui avec le lever du soleil, nous nous trouvions plus dans un paysage irlandais. Comme quoi, les paysages du retour ne sont jamais les mêmes que l’aller, c’est cela qui est beau d’ailleurs…

Cette fois, après le col Peyre Saint Martin, nous avons pu voir plus que le bout de notre nez, et franchement la veille nous avions loupé quelque chose à cause du brouillard. Une descente magnifique avec cascades, neiges, lacs émeraudes et roches purple (assorties à la tenue de Marine, alias miss Purple Girl !).
Voilà, plus nous descendions, plus nous voyons des touristes (la fameuse promenade du dimanche) et cela sonnait la fin de notre magnifique trek…
Que retenir de ces 3 jours :
Pour une première à randonner dans les Pyrénées, je m’en souviendrai, c’est indéniable ! D’ailleurs, j’ai même envie de vite y retourner, histoire de découvrir tous les recoins que peuvent cacher ces montagnes, ce qui va me prendre du temps je pense ! Avoir eu la chance de partager mes aventures avec une fille géniale, c’est encore mieux ! Malgré nos péripéties du premier jour, je crois qu’elle a kiffé aussi, car elle aussi c’était une première (pour sa première rando de sa vie, elle n’a clairement pas été épargnée, au moins les autres lui paraitront easy !).
La montagne ça vous gagne, mais peut-on réellement gagner face à elle ?
Tu te sens libre, tu penses tout dominer, être invincible. En fait, non c’est la montagne qui te domine, qui fixe ses propres règles, qui peut te donner une énorme claque, te faire clairement redescendre (au propre comme au sens figuré) car finalement tu n’es rien face à elle… L’abandon, le renoncement, ce n’est rien face à la vie. Prendre une décision qui peut te couter la vie, continuer à avancer alors qu’en 1/10eme de seconde tout peut basculer et bim, la montagne t’a clairement dominée…
Et surtout ne pas l’oublier…
Si tu perds ne perd pas la leçon.
Dalaï Lama
Bravo pour votre analyse des situations limites et pour les décisions qui s’imposent.
Juste une question lors de vos escapades extrémes : Avez-vous un téléphone satellite avec vous ou un moyen de communication adapté en cas de nécessité ??? .
Cordialement.
PC
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Nous avions nos téléphones qui peuvent fonctionner en cas d’urgence, même sans réseau. C’est pour cela que je coupe le téléphone pour avoir toujours de la batterie en cas de problème.
Merci beaucoup pour vos commentaires. Gabrielle
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Félicitations les filles ! tes photos sont magnifiques Goby, j’aurais tellement aime partager cela avec vous 🙂
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me tooo ma Bleuette !!
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Ping : La traversée des Pyrénées par l’HRP : Partie 6 : De Pont d’Espagne à la Pierre Saint Martin – Gobynette