Revivez mon premier IronMan 70.3 apocalyptique

Comment décrire ce que j’ai pu vivre pendant cet IronMan 70.3 ? C’est difficile de mettre des mots sur ce que j’ai pu ressentir sur cette épreuve qui fût pour moi incroyable. Je sais aujourd’hui qu’ « Anything is possible ». Pourquoi tout est possible ? Parce que je me suis transcendée, parce que je suis allée au-delà de moi-même, parce que j’ai fait subir à mon corps quelque chose dont il se souviendra longtemps, et parce que même si mon corps me disait « stop » c’est au final mon cœur qui m’a guidée pour parvenir au bout de mon objectif, être finisher de mon premier Half IronMan…

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la veille au retrait des dossards lorsqu’il faisait beau
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un avant gout de la partie course à pied

Le départ

Le réveil sonne : 4h40 !! Une petite nuit mais bizarrement je me sens en forme (sans doute la première nuit depuis une semaine où je dors vraiment bien).

Un bon petit déjeuner (du pain Nutella, rooh je rigole !!), mes petits tatoo IR 509 (nom numéro de dossard) faisant corps à corps avec ma jambe et mon bras, je me sens prête à en découdre avec cet IronMan 70.3 qui s’annonce costaud et pour lequel je me prépare depuis plusieurs mois.

Avec Valentin (champion de France de triathlon Longue distance), Antoine (qui gagnera l’épreuve chez les amateurs) et Paul Louis (mon coiffeur attitré), je suis bien entourée dans la navette qui nous mène au lac Peyrolles. Paul Louis tente de me faire une tresse (no comment, cf la photo de moi de dos en sortant de l’eau !), finalement c’est peut-être mieux d’être entre filles avant une course !!

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Check des vélos dans le parc à vélo, c’est bon il est toujours là !! Regonflage des pneus et hop je commence à me mettre en condition d’avant course.

Vaseline, combinaison, puis nous commençons à nous diriger vers le lac. Barbotage pour tester l’eau (et faire pipi, mais chut, car trop de queue pour les toilettes).

Puis il est l’heure d’aller dans les sas de départ (en fonction du temps que nous souhaitons mettre en natation) avec Paul Louis. Les pro sont déjà partis, je stresse pour Valentin, au moins ça ne me fait pas penser que moi aussi je vais devoir me mettre à l’eau ahhhhhhh !! Il a l’air bien parti, non je rigole, on ne voit rien !!

Rencontre de Floriane que je connaissais seulement via instagram, nous sommes toutes les deux super excitées !!

Les premiers amateurs prennent le départ par vague de 5 toutes les 8 secondes

Ça y est la pression monte !!

Entre temps les pro ont déjà eu le temps de faire tranquillou 1900m et de sortir de l’eau, pendant que toi tu es encore sur la plage à stresser !!

Une tape dans la main et hop c’est parti avec PL « kiffe à fond ta course », on ne savait pas encore ce qui nous attendait…

La partie Natation

C’est le moment où tout s’arrête, où plus rien n’a d’importance autour de moi et où je me dis que je suis complètement seule (enfin j’essaie d’y croire). Pour rappel, je panique à l’idée de nager avec du monde autour de moi…

 

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Et bizarrement cela marche car j’arrive à poser ma nage rapidement en prenant un rythme. Je fais vraiment abstraction du fait que je nage en eau libre dans un lac, au plus profond de moi je me dis que c’est comme en entrainement dans une piscine… Bref, je repense aux conseils que la championne de Bretagne de triathlon m’avait donné l’année dernière : pense à des choses qui te rendent heureuse, alors c’est ce que j’ai fait.

C’est fou, vous allez me prendre pour une illuminée, mais au fond de l’eau, un halo de lumière m’éblouissait et j’ai alors su qu’elle serait là avec moi pendant toute ma course, cette personne très très spéciale qui nous a quittés il n’y a pas longtemps, et qui me manque énormément. Au final comme si elle me faisait un petit clin d’œil de l’au (l’eau)-delà

Je garde un magnifique souvenir de cette communion avec l’eau (Gabrielle spirituelle sort de ce corps !!), et franchement pour la première fois en triathlon j’ai pris du plaisir à nager.

Les entrainements de plusieurs mois ont payé et je tiens à remercier Victor mon coach de natation pour tous les entrainements et conseils ainsi que Valentin pour m’avoir permis d’améliorer ma technique de nage.

Voilà je sors de l’eau en 39min, en ayant fait quelques zigzagues. Je sais que je peux encore m’améliorer sur la partie natation mais déjà j’ai fait un grand pas aujourd’hui, en ne paniquant pas.

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la fameuse tresse de PL

Pas de fatigue, je me sens bien, prête à affronter le plus dur, mais cela je ne le sais pas encore…

Jusque-là tout allait bien…

Une transition un peu longue car il y a environ 500 mètres entre la sortie de l’eau et le parc à vélo. Je me sèche un peu les bras avant d’enfiler mon tee-shirt Kiwami par-dessus ma trifonction ainsi que mes manchons. Casque, lunettes de soleil (tellement inutiles aujourd’hui), chaussures de vélo et hop hop c’est parti !

La partie Vélo de l’extrême

90km de vélo qui s’annonce, avec 1300m de dénivelé positif, ce n’est pas rien.

Le début du parcours est assez plat, j’en profite pour manger un bout de barre (j’ai découpé mes trois barres en 4 morceaux pour les manger régulièrement) et boire (boisson Maurteen que j’ai testée en entrainement).

Gros vent de face pendant les 20 premiers kilomètres. Je double quelques filles, je discute avec l’une d’elle. On se motive l’une et l’autre mais je la perds dans la première montée (à force de m’entrainer avec du dénivelé je dois dire que les montées passent toutes seules).

Le moment le plus drôle de la course arrive maintenant ! Comment fait-on pour faire pipi sur un half IronMan ? On s’arrête ? (sachant que j’étais en trifonction méga moulante avec un tee-shirt en plus…) ? On se pisse dessus ? On n’en parle pas assez mais ce sont des questions existentielles haha !! Bref, Valentin m’a dit dans la voiture : « c’est simple, tu attends une descente, tu te détends et ni vu ni connu tu te pisses dessus ». Mouais, plus facile à dire qu’à faire d’autant plus lorsque tu es tout seul devant, sans personne autour de toi.

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le moment dans la voiture où Valentin m’a appris à pisser sur un half !!

Tout cela pour dire que j’avais envie de faire pipi et tiens donc une descente arrivait… Alors j’ai tenté de mettre en pratique les conseils du Pro. Sauf que contrairement à lui je n’étais pas seule devant !! Donc tranquillement je me détends, j’arrête de pédaler et un mec me crie par derrière : « Allez Gabrielle, on continue de pédaler dans les descentes ». Merde, il m’a complètement déconcentré, pourtant j’y étais presque !! Tentative de pipi avortée ! Mais bon ça n’empêchait pas que j’avais toujours envie.

Il y a eu une petite montée, puis encore une descente et la bim, j’ai réussi à me pisser dessus lool (ne vous inquiétez pas j’ai bien nettoyé ma trifonction depuis !). Et cela tombait bien, car grosse averse au 25ème km.

Cet aparté terminé, continuons ce parcours vélo. Je me suis fait pas mal doubler par des mecs qui m’encourageaient (certains me connaissaient d’insta), ce qui fait plaisir.

J’ai encore discuté avec une autre fille, qui m’a fait cette réflexion « on a eu l’averse, c’est bon je ne pense pas qu’on aura encore de la pluie, car je suis déjà gelée », ironique quand on connait la suite. En fait cette averse n’était rien par rapport à l’après… Je lui ai souhaité bon courage pour la suite et j’espère pour elle que cela s’est bien passé.

Une portion de plat où j’avance bien malgré le vent de face…

Puis ça y est, il se remet à pleuvoir. Je suis qu’au 40ème km et plus je regarde au loin, plus le ciel est noir. Je me prépare donc à 60km d’enfer, c’est le moins qu’on puisse dire.

J’ai pensé très fort à mon papa avec qui deux semaines plus tôt en Ardèche j’avais fait une sortie de 92km avec l’ascension d’un col de 12 km sous la grêle (il pleuvait déjà avant depuis 20km). Nous nous étions fait la réflexion que j’avais vécu le pire et que les conditions ne pourraient qu’être meilleures à Aix, oups pas du tout ! J’avais subi le début de l’enfer, là j’allais vivre le fin fond de l’enfer.

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pas du tout une photo de la course mais justement pendant la sortie avec mon papa avant la pluie…

Une pluie diluvienne, une chaussée complétement détrempée, des personnes qui s’arrêtaient pour sortir leur kway et mettre leurs gants (oh des gens intelligents qui avaient anticipé les conditions !!). Perso je n’avais rien à part mon petit cœur pour me réchauffer…

A partir de ce moment et ce jusqu’à la fin du vélo, cela a été un combat. A quoi ai-je pensé ? A toutes les pires situations que j’avais pu vivre dans ma vie (pour essayer de relativiser avec ce que je vivais), la foudre et notre tente en mode piscine au fin fond de la Mongolie et où l’on se demandait comment on allait dormir, l’accident de 4*4 au milieu du désert d’Uyuni, toutes les situations où j’ai eu tellement froid au Canada quand j’y vivais (et surtout sur l’ascension de Monts), mes pieds verts sur le GR20, mes mains devenant blanches un nombre de fois incalculables, mais mon père me disait toujours que j’étais loin de perdre mes doigts.

Alors même si je ne sentais plus mes doigts et qu’ils étaient blancs je savais que la situation n’était pas encore critique, donc je n’ai pas du tout paniqué et j’ai continué à rouler. J’ai aussi appris pendant mes randos un peu extrêmes que lorsque le cœur se réchauffe, le corps aussi, c’est donc pour cela que j’ai encore pensé à des choses joyeuses. Encore une fois, ma tante était là avec moi, j’en suis persuadée, c’était une femme tellement forte et rien que pour elle je n’aurais jamais lâché…Oui cette course je l’ai fait pour moi mais aussi pour elle…

Un peu avant le sommet du col ou au sommet je ne sais plus (vers le 75km), un Monsieur est passé à côté de moi en me disant que c’était bien, qu’on allait y arriver. Il a vu que j’avais tellement froid et m’a proposé qu’on s’arrête pour me donner son kway. Franchement je n’oublierai jamais ce geste. Cette course a été un énorme moment de partage et de solidarité…

Il m’a sorti deux bouts de barres que j’ai engloutis (car je ne pouvais plus manger ni boire à cause de mes mains transies).

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Ce n’était pas Laurent Jalabert, mais lui aussi est un grand Monsieur… Je me souviens petite quand on allait sur les étapes du tour de France avec mon père pour l’encourager. Cette fois je faisais une course avec lui !!

J’ai continué, je pouvais encore un minimum freiner. J’ai fait énormément attention, je voyais des gens qui s’arrêtaient, qui marchaient, qui étaient tombés. C’était un peu comme dans les films post fin du monde (j’exagère à peine).

Je me suis arrêtée au dernier ravito (au 81km), je leur ai demandé s’ils n’avaient pas une boisson chaude, mais non. Le bénévole m’a dit que j’étais presque arrivée, il m’a donné la force de remonter sur mon vélo et de terminer cette partie de vélo.

Je ne pouvais plus changer les vitesses et plateaux, donc j’ai fait la dernière montée sur la plaque, c’est passé tout seul (je crois qu’à ce moment-là, le vélo paraissait simple par rapport à tout ce que j’étais en train de faire vivre à mon corps).

Un énorme soulagement lorsque j’ai distingué entre mes lunettes de soleil détrempées le panneau « Aix en Provence », pour moi c’était comme si j’avais terminé la course. Je savais que j’irai au bout quoi qu’il arrive.

Je suis arrivée dans le parc à vélo de la deuxième transition, j’ai remarqué en déposant mon vélo que j’avais bu qu’un seul bidon en 3h40, j’allais le payer sur la course à pied… (pareil pour mon stock de barres). Quand je pense que je me suis entrainée à boire et manger en vélo pour que cela passe bien le jour de la course, au final j’ai quasiment rien mangé !

Je me suis réfugiée sous une tente avec des personnes qui parlaient d’abandonner. J’ai croisé Floriane qui m’a enlevé mon casque (oui je ne pouvais vraiment pas bouger mes doigts) avant qu’elle parte pour son semi.

Une autre personne m’a enlevé mes chaussures de vélo, j’ai mis des chaussettes sèches. Pareil on m’a lacé mes baskets, franchement une solidarité dans cette adversité. Mes jambes n’arrêtaient pas de trembler et je claquais des dents. On m’a dit de me trouver une couverture de survie, mais il n’y en avait plus.

Alors je suis allée dans une salle chauffée, avec des personnes qui avaient abandonné ou qui attendaient pour repartir et j’ai demandé à quelqu’un de me donner sa couverture pour que je puisse aller courir.

Une transition de 14 ou 15min du jamais vu…

Le Semi-Marathon

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dommage je n’ai pas de photo en couverture de survie !

Avez-vous déjà couru avec une couverture de survie ? C’était l’accessoire fashion de ce semi (oh faut bien un peu rigoler !).

Franchement quand j’y repense, j’aurais été spectateur, je me serai bien marrée en voyant des zombies courir avec leurs couvertures de survie (les gars arrêtez on n’est pas dans un film là !!)

Je partais pour un semi-marathon sans sentir mon corps, ma tête était présente mais mon corps était bloqué en mode glaçon

Un semi assez technique avec des montées et des descentes, un passage complètement boueux dans un parc (en mode cross), à faire 3 fois, en gros tu as le temps de le connaître par cœur !

Mes pieds et mes mains ne se sont pas vraiment réchauffés. J’ai dû enlever ma couverture au 6eme km (mince je faisais un fashion faux pas !), à chaque ravito quand je demandais de l’eau, mes gobelets ne tenaient pas dans mes mains, les bénévoles ont vite compris qu’il fallait m’assister en me refermant ma main !

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Donc j’ai couru à une petite allure de mamie, je sentais que j’allais vraiment chercher toute mon énergie dans mes réserves (que je n’ai pas vraiment).

De toute façon quand j’étais sur mon vélo, le temps que je m’étais fixée pour finir mon premier Half IronMan (moins de 6h), n’avait plus d’importance… Vu les conditions extrêmes, le but était tout simplement de le finir… c’était mon état d’esprit sur le semi marathon (que j’ai fait en 1h54).

Au 14ème, un Monsieur en vélo a eu la gentillesse de m’ouvrir mon gel, ce qui m’a donné un petit coup de boost (enfin je l’ai avalé en marchant dans une montée). Yoann m’encourageait à chaque fois que je repassais dans le centre d’Aix au niveau de l’arrivée !

Je sentais vraiment que j’étais en hypoglycémie car au dernier ravito, à 2km de la fin j’ai dû m’arrêter pour manger une banane.

Je ne vous raconte pas le bonheur, élan d’énergie dans la montée et j’hurlais presque « c’est fini, c’est fini, c’est fini ». Je suis désolée pour les mecs que j’ai doublés et qui étaient seulement à leur 1er ou 2ème tour en leur faisant croire n’importe quoi, mais j’avais besoin d’exprimer ce bonheur.

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Lorsque j’ai franchi la ligne d’arrivée, la souffrance s’est envolée comme par magie pour laisser place à un immense bonheur… Et j’ai pleuré, je n’en revenais pas d’y être arrivée tellement cette course a été compliquée. Je ne réalise pas le temps souhaité mais clairement je m’en fiche parce que je l’ai fait et c’est tout simplement énorme ! En 6h45.

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Je vous souhaite vraiment de pouvoir vivre une aventure comme celle-ci, qui m’a prouvé que TOUT EST POSSIBLE. Tout a été possible grâce à des personnes d’exception qui m’ont soutenues pendant toute ma prépa, également grâce à toutes les personnes présentes pendant la course (bénévoles, supporteurs, amis), et enfin grâce à toutes les personnes que j’aime et qui étaient présentes dans mon petit cœur, dont ma tante qui a été mon rayon de soleil (oui il était là !!) pendant cette course

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Alors MERCI car si j’ai réussi à le faire ce n’est pas seulement grâce à moi !

 

Crédit photos : Yoann Rochette 🙂

 

 

 

 

 

 

7 réflexions sur “Revivez mon premier IronMan 70.3 apocalyptique

  1. Patrick de calatchi

    Pour une épreuve hors norme , il faut un mental d’acier , une détermination sans faille , une préparation rigoureuse….!.

    Réussite : Exemplaire.

    Merci

    Rien n’est aussi contagieux que l’exemple.
    La Rochefoucault

    Aimé par 1 personne

  2. Fanny

    Bravo Grabrielle ! Quel bel exemple ! C’est ça le sport, se servir de son vécu, de ce qu’on a à l’intérieur de soi. Le sport c’est l’entraide, le dépassement de soi. C’est le genre de défi dont on se souvient toute sa vie !

    Aimé par 1 personne

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